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Pour le Dr Jaishankar, l’” eurocentrisme ” est mort; est-ce qu’une page se tourne?

On se souvient que le 2 mars, 35 pays et se sont abstenus lors du vote de la résolution de l’ONU exigeant le retrait des forces russes de l’Ukraine. Parmi ceux-ci, il y avait 17 pays africains ainsi que l’Irak, l’Iran et, parmi d’autres, l’Inde. Il s’agissait clairement d’une rupture sans équivoque face à un monde atlantique habitué à fixer les agendas et les feuilles de routes que les autres pays sont priés d’adopter et de mettre en place. Le message était limpide, le conflit entre l’Ukraine et la Russie, expression de la vision géopolitique occidentale, ne nous concerne pas. Mais, au delà, c’est aussi le révélateur d’un changement de fond appelé à devenir  la norme : une communauté internationale existe qui n’entend pas être le faire-valoir ou le jouet d’un monde unipolaire.

Face au “narratif” totalement univoque des pays occidentaux, la perception qu’ont de cette guerre les autres pays de la planète est des plus différentes, surtout lorsque certains de ces pays ont été le théâtre où dans le voisinage immédiat des multiples guerres aussi illégitimes que meurtrières qui n’ont “profité” qu’aux seuls intérêts américains et ceux de ses alliés.Jaishankar_Inde

Alors, oui, il faut bien comprendre que la guerre en Ukraine a déclenché un changement de paradigme et que rien ne sera plus comme avant, comme l’a exprimé sans ambages M. Subrahmanyam Jaishankar, le ministre indien des Affaires étrangères.

S’exprimant le 3 juin au Forum GLOBESEC 2022 de Bratislava, dans le cadre d’une tournée en Slovaquie et en République tchèque, il a abordé sans détour les choix de l’Inde en matière de politique étrangère : “Je ne pense pas qu’il soit nécessaire que l’Inde rejoigne un quelconque axe. L’Inde a le droit de faire ses propres choix, qui seront un équilibre entre ses valeurs et ses intérêts. Je ne prend pas position parce que je ne suis pas d’accord avec vous. Ce que cela veut dire, c’est que je m’occupe de ce qui me concerne.”.

De fait, l’Inde représente un cinquième de la population mondiale et se situe comme 5ème ou 6ème plus économie, une réalité qui, comme le fait remarquer M. Jaishankar, donne droit d’avoir son propre point de vue mais que les pays occidentaux ont décidé d’ignorer de la même manière qu’ils passent par “pertes et profits” les problèmes auxquels sont confrontés ces mêmes pays, un aspect que le ministre des Affaires étrangères a rappelé : “Beaucoup de choses se passent en dehors de l’Europe. Il y a tellement de catastrophes humaines et naturelles dans notre partie du monde, et de nombreux pays se tournent vers l’Inde pour obtenir de l’aide. Le monde change et de nouveaux acteurs arrivent. Le monde ne peut plus être eurocentrique. L’Europe doit cesser de penser que ses problèmes sont ceux du monde, mais que les problèmes du monde ne sont pas ceux de l’Europe”.

Et oui, le monde existe en dehors de l’Europe et des Etats-Unis, sauf qu’aujourd’hui il entend le signifier d’autant plus haut et fort que le monde occidental non seulement se montre incapable  de s’attaquer, avec le reste de la communauté internationale, aux vrais problèmes qui se posent à l’humanité dans son ensemble mais, pire encore, n’en montre aucune volonté réelle et crédible.

–> voir: article dans The Economic Times

 

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